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quarta-feira, 28 de janeiro de 2015

Vue de l’atelier de Gustave Moresée Gustave Moreau retrouve son charme d'origine

Après douze mois de travaux, la maison du père fondateur du symbolisme réouvre au public dans l'esprit Belle Epoque de sa naissance. 
 
 
Aucun anachronisme n’est venu en un siècle entacher la maison hors du temps de Gustave Moreau. 


Dans Hibernatus, avec Louis de Funès, le héros ressuscite d’entre les morts — ou presque, il était congelé dans la banquise — et rentre chez lui 65 ans après en être parti. Pour qu’il ne soit pas traumatisé, ses descendants s’efforcent de redonner à sa maison, meublée années 70, l’allure Belle époque qu’elle avait autrefois. Au musée Gustave Moreau, c’est exactement l’inverse.

Le peintre, mort il y a plus d’un siècle (1826-1898), pourrait bien surgir de la glace et sonner à sa propre porte qu’il ne remarquerait rien d’anormal. Car rien n’a changé dans cette maison-musée au charme 100% Belle Epoque, qui vient juste de rouvrir au public après une rénovation à l’identique. La demeure du père fondateur du symbolisme, mouvement né du refus du rationalisme galopant de la fin de XIXe siècle, cette maison, donc, est la seule à Paris transformée en musée par un artiste lui-même — les musées Rodin, Henner ou Scheffer (musée de la Vie Romantique) étant des réalisations posthumes.
De Debussy à Breton

Au 14, rue de la Rochefoucauld, Paris 9e, adresse de feu Monsieur Moreau, le temps s’est calfeutré derrière des rideaux damassés, dans un XIXe siècle moribond se réfugiant entre rêve et mystère. On s’y laisserait volontiers enfermer après la fermeture pour expérimenter un voyage dans le temps où se croiseraient les fantômes de Claude Debussy ou de Théophile Gautier, habitués des lieux. André Breton avait découvert le musée enfant, il rêvait d’y entrer par effraction et d’y passer la nuit…

La belle résidence de la Nouvelle-Athènes, le quartier bobo par excellence du XIXe siècle, fut achetée par les parents Moreau en 1852 pour leur fils. Ils y ont vécu avec lui et y sont décédés. Alexandrine Dureux, l’amie de cœur du peintre, éternel célibataire, y venait tous les jours jusqu’à sa mort en 1890. Quand le taciturne Moreau s'y retrouve seul, retranché dans son atelier, il est un artiste reconnu, académicien, professeur à l’école des Beaux Arts (il enseigna à Rouault, Matisse ou Marquet), mais se voit vieillir et redoute que son œuvre soit dispersée après sa mort. Il décide de transformer sa demeure en musée et de la léguer à l’Etat, à la seule condition qu’elle soit conservée telle quelle.
25 000 pièces

En 1895, les travaux commencent. L’intérieur est complètement remanié, un troisième étage et de nouveaux escaliers ajoutés, selon les indications précises du maître des lieux qui a tout consigné, notamment l’accrochage de ses œuvres. Il meurt trois ans plus tard avant d’avoir mené son projet à terme. Le chantier sera achevé par son exécuteur testamentaire et ancien élève, Henri Rupp. Le musée ouvre au public en 1903.

Janvier 2015. Après douze mois de travaux, on peut à nouveau franchir le seuil de cette bulle hors du temps qui abrite sur quatre niveaux plus de 25 000 pièces, dont 15 000 de Gustave Moreau, parmi lesquelles 13 000 œuvres graphiques et 3000 photos conservées dans un nouveau cabinet. Seule petite entaille aux dernières volontés du maître : une réserve et une salle de consultation de 180 m2 ont été créé au sous-sol, en creusant à la pelle.
La nostalgie de l'intime

Au rez de chaussée, les travaux rendent à la demeure sa configuration initiale, puisque six salles fermées, envahies au fil des décennies par les réserves et les bureaux sont rouvertes. Les voilà à nouveau cabinets d’exposition avec des murs bordeaux comme à l’origine, des cheminées de marbre et des tapisseries à ramages refaites à l’identique en Angleterre. Le charme fonctionne immédiatement. On y découvre 400 petits tableaux, esquisses et variations d’une modernité étonnante, des pastels et des dessins accrochés à touche-touche du sol au plafond. Et des placards incroyables conçus par Moreau lui-même, dotés de volets pivotants, un peu comme les présentoirs à carrelage, permettant d’accrocher des œuvres par dizaines et de les feuilleter comme un catalogue.

Au premier étage, les occupants de l’appartement familial semblent être partis la veille. Le voyage dans le temps prend un dimension émouvante. La visite se poursuit comme on lit Proust — lequel raffolait du lieu —, avec attention, entre émerveillement et nostalgie. Il se dégage de ces bibelots, photos de famille, horloges sous globe et commodes vernies tant de réminiscences littéraires, familiales ou imaginaires que l’ancien lieu de vie se transforme en lieu de mémoire. C’est l’effet madeleine du couvre-lit tiré à quatre épingles…
Mysticisme et onirisme

En une pirouette l’ambiance change. Littéralement parlant : les ateliers situés aux étages supérieurs sont accessibles par un escalier à double vrille si spectaculaire qu’il figure dans les guides touristiques du monde entier. On pénètre alors dans le vrai domaine du maître, un atelier époustouflant d’une hauteur de 7 mètres sous plafond, doublé d’un second à l’étage supérieur. Murs entièrement recouverts de tableaux grands formats, toiles sur chevalets comme s’il venait de poser le pinceau, classeurs à aquarelles… Gustave Moreau abat ici toutes ses cartes. Et des cartes maîtresses : sur les murs règnent sans partage ses James Bond Girls tout droit sorties de la mythologie, les Léda, Messaline, Galatée ou Salomé, héroïnes inaccessibles et dominatrices habillées de voiles légers rehaussés d’arabesques d’or, campées sur de splendides fonds à la matière ciselée, aux couleurs moirées de bleu, d’orange ou d’or, comme de riches brocards ou de précieux objets d’art émaillés offerts à la cour de rois de légende.

Gustave Moreau était le démiurge d’un monde onirique, le Dieu vivant du cénacle des Symbolistes. Sa peinture extraordinaire et sophistiquée faisait rêver. Sa maison était un temple. L’écrivain Karl-Joris Huysmans vénérait ce « mystique enfermé en plein Paris », quittant rarement l’atelier, attelé à son chevalet comme à une mission divine. Pour Edgar Degas, compagnon de jeunesse connu lors d’un voyage en Italie en 1857, il fut le révélateur de la matière. Mais trente ans plus tard, le peintre impressionniste se moquait méchamment de son ancien camarade accusé de mettre « des chaînes de montres aux Dieux de l’Olympe ». Aucun anachronisme n’est pourtant venu en un siècle entacher sa maison hors du temps. L’écrin a protégé l’œuvre dans son intégrité, exactement comme il l’avait projeté.


fonte: @edisonmariotti #edisonmariotti http://www.telerama.fr/sortir/le-musee-gustave-moreau-fait-peau-neuve-dans-l-esprit-belle-epoque,122033.php
  • un siècle entacher sa maison hors du temps. L’écrin a protégé l’œuvre dans son intégrité, exactement comme il l’avait projeté.

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